Jean Le Boël, habitant habité du monde

Durant sa résidence d’écriture briviste partagée entre les mois de février et d’avril 2022, Jean Le Boël, lauréat du grand prix de poésie de l’Académie Mallarmé en 2020, est venu ouvrir un nouveau chapitre de ses Fragments d’une autobiographie fictive (éditions Henry). Dans ce troisième tome, il interroge l’idée de résidence…

Au sortir de sa résidence d’écriture briviste, mi-avril, il ne restait plus à Jean Le Boël que 7 ou 8 pages à rédiger… Le poète a tout dans la tête, le conducteur ou chemin de fer si l’on veut. Il ne saurait écrire autrement, se lancer avant d’avoir tout méticuleusement pensé, intellectuellement structuré. « Je programme des mots qui déclenchent telle idée et construisent telle page. » Tel est le processus d’écriture à l’œuvre chez cet écrivain. Chacun le sien.

Mais avant que cette machinerie ne se mette en branle, il est question de désir. « Brive, le temps de la résidence et la maison-même accueillant les écrivains ont joué ce rôle-là : l’élément moteur ». Il poursuit : « Je ne suis pas obsédé par l’idée de publier et j’ai bien conscience qu’un livre de plus ou de moins de moi ne va pas changer la face du monde ! Je n’avais pas de projet d’écriture mais ce temps de résidence qui m’a été offert a été pour moi l’occasion de faire le point. D’interroger l’idée de résidence. »

Il poursuit : « Je voulais questionner le fait d’appartenir à deux cultures : picardes et limousines et ce n’est pas si anodin que cela. »Jean Le Boël parle alors des accents, des patois. Il raconte aussi un épisode qu’il a en commun avec Claude Duneton : « Venus de milieux ruraux, nous sommes partis explorer des territoires intellectuels et urbains sans penser devenir différents. Mais une fois revenus, les gens du terroir, eux, nous sentaient différents. Or ce que j’ai appris à aimer, je pense qu’ils pourraient l’aimer aussi : l’opéra, la poésie contemporaine… »

La poésie pour tous, Jean Le Boël le défend depuis longtemps en dehors des cases, des carcans, par-delà les murs… « On ne réside pas dans des murs mais dans une communauté », explique-t-il, retrouvant le fil de cette idée de résidence. Je me suis beaucoup promené à Brive et les rencontres que j’y ai faites sont gratifiantes. Habiter, c’est être avec les autres, les accepter. »

(Crédit : Isabelle Clement)